Dossier extrait de MOTO JOURNAL
http://www.moto-journal.fr/dossiers/guide-complet-pour-debuter-le-circuit/.
Débuter le circuit : tous les conseils pour se lancer par Rémi Darodes
Le circuit cristallise tous les fantasmes du motard, berceau de la performance, nombreux y ont songé, mais peu ont osé. Avant de franchir la porte du paddock les inconnues sont multiples. Où rouler ? Avec quoi ? Avec qui ? Comment ? Combien cela coûte ? Moto Journal répond à toutes ces questions à travers ce petit guide pour commencer la piste dans les meilleures conditions.
Pourquoi commencer la piste ? Dans une société bienveillante, où la recherche continuelle du risque zéro et la sur-prévention, ont fini par assécher totalement nos voies publiques de toutes sensations, il subsiste un dernier lieu garant de notre ivresse. Le circuit ! L’ultime recours pour se désaltérer sans appréhension de rasades d’adrénaline, et ce avec un minimum de risques. Sur piste il n’y a plus de carcan limitant la performance, on la recherche. On ne conduit plus, on pilote.
Prérequis pour rouler sur piste: « Launch control activé ! »
Le premier prérequis est d’être au minimum titulaire du permis gros cube. A défaut, il est possible de rouler avec le CASM, permis d’aptitude aux sports mécaniques. Ce dernier donne le droit d’évoluer dans le seul cadre d’un circuit fermé et homologué par la Fédération Française de Motocyclisme. Concernant l’assurance de votre moto, elle n’est pas obligatoire et rares sont les pilotes qui assurent leur machine. Certaines assurances proposent de couvrir les sorties occasionnelles, voir d’assurer par des contrats spéciaux une moto dédiée à la piste. Dans tous les cas une responsabilité civile sera exigée par tous les organisateurs.
Pour les rouleurs réguliers la Fédération Française de Moto propose des licences à l’année, sinon il existe des Pass Circuit à la journée. Ils comprennent une Responsabilité Civile ainsi qu’une assurance individuelle en cas d’accident. Il est aussi impératif de porter un équipement complet pour circuit, auquel cas l’accès à la piste peut vous être refusé. Certains organismes louent l’équipement comme la moto, mais souvent à des tarifs prohibitifs.
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Où rouler sur piste ? « Direction le paradis »
En France, de nombreux circuits sont ouverts aux amateurs. Parmi les plus connus il y a Ledenon, le Pôle mécanique d’Alès, mais aussi Carole et Magny-cours…. Il y en a « à la pelle » et pas de besoin de creuser longtemps, toutes les sorties de l’année, sur tous les circuits, sont recensées sur le site www.calendrier-piste.fr.
Elles sont généralement mises en place par des « organisateurs » privés ayant loué le circuit. C’est auprès de ces derniers qu’il faut s’inscrire. En pleine saison, soit de mai à août, il faut anticiper ses inscriptions un mois à l’avance. En cas d’averse le jour du roulage, le remboursement est rarement pratiqué. L’inscription coûte en moyenne 125€.
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Préparer sa moto pour la piste: « Moto stock ou d’usine ? »
L’huile moteur est la santé d’une moto, afin d’éviter tous symptômes, il faut commencer par une vidange et un remplacement du filtre à huile. Idéalement prévoyez un remplacement de tous les fluides, liquide de refroidissement, liquide de frein etc… Vous pouvez tout à fait rouler avec une moto de route entièrement d’origine sur circuit, mais il conseillé de la chausser de pneumatiques adaptés qui sont aussi homologués pour la route (Pirelli Supercorsa, Dunlop D211, Michelin Power Cup…). Cependant il faut au minimum retirer les rétroviseurs et recouvrir les feux de scotch type « américain ». En cas de chute, le ruban adhésif évite que les optiques explosent sur la piste. En cas de sorties régulières, il est préférable de disposer d’une moto exclusivement dédiée à la piste, voici les préparations minimum conseillées :
Châssis
Installez des commandes reculées pour améliorer la garde au sol. Pour les machines typées route, il est préférable de faire une vidange de fourche pour un indice de viscosité supérieur (typer 15′ ou 20′), voir changer les ressorts de fourche.
Poste de pilotage
Il est conseillé d’ouvrir l’angle des demi-guidons de quelques degrés pour optimiser le bras de levier au contre braquage lié au pilotage. Autre astuce pour augmenter l’agrément en conduite sportive, les « grips de réservoir ». Ils améliorent le maintient des genoux lors des déhanchements. Pour éviter tout souci au niveau des poignées, il faut entourer les caoutchoucs des poignées de votre guidon avec du fil de fer fin pour correctement les serrer sur le guidon. Cela évitera qu’elles s’enlèvent sous une forte pression.
Freinage
L’endurance des systèmes de freinage est mise à rude épreuve sur circuit. Pensez à installer des durites aviations pour éviter de perdre en mordant sur les prises de levier un peu trop prononcées. Les durites d’origines en caoutchouc ont une fâcheuse tendance à gonfler. Vous pouvez conserver vos plaquettes d’origines, elles sont en règle générale de bonne facture et suffisamment efficaces.
Échappement
L’origine suffit. Le seul avantage d’un pot adaptable est la réduction de poids, mais ils sont souvent trop bruyants. Prévoyez impérativement une chicane, puisque tous les circuits français contrôlent le bruit et imposent une limite de 95 décibels.
Protections
Il est conseillé d’équiper sa moto d’une paire de carénages en polyester (« poly’ »). Des protections de carters d’allumage et d’embrayage en carbone ou kevlar, sont aussi conseillées. Une paire de tampons de protection ne sera pas de trop non plus et protégera votre radiateur, vos polys et tout appendice exposé. N’optez pas pour des tampons trop proéminents, s’ils s’avèrent trop longs, ils constitueront un point d’appui sur les vibreurs risquant de faire faire des tonneaux à votre moto.
Pneumatique
Vous pouvez conserver vos pneus de route pour votre première fois, mais ils doivent être en bon état. Il faut veiller à ce qu’ils ne soient pas trop anciens, auquel cas la gomme risque d’avoir séchée et perdue considérablement en grip. Ancienneté maximum de 3 ans. Dans l’idéal il faut s’orienter vers les pneus sportifs structurés homologués sur route, tels que les Michelin Power Cup, les Pirelli SuperCorsa, ou encore les Dunlop D211. La pression fait l’objet d’une attention toute particulière. Sur piste, il faut oublier les recommandations du constructeur dont les pressions sont souvent élevées. Sur piste, il est conseiller de partir avec une pression de 2,1 bar à l’avant et 1,9 à l’arrière à froid. Une pression à adapter selon votre rythme de roulage et des pneumatiques utilisés (basse pression).
Le choix d’une moto pour la piste : « Trouver le bon guidon »
Pour débuter il faut favoriser les motos dociles et raisonnables et éviter toutes les machines à la puissance démesurées. Plus la cylindrée est importante, plus l’inertie des pièces en mouvement (piston etc) nuisent à la maniabilité. Le mieux est donc de se limiter aux mid-size, à des machines légères et agiles facilitant la mise sur l’angle et annihilant l’appréhension de la remise des gaz (même si l’on peut glisser de l’arrière avec une moto peu puissante). Ce n’est pas avec une masse que l’on plante une punaise sur un mur en placo’. Enfin, privilégiez les machines s’étant particulièrement bien vendues et éviter les modèles trop exotiques. En cas de chute « il va falloir de la pièce » et pouvoir s’approvisionner sur les sites tels que LEBONCOIN.
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Le jour j : « En place sur la grille »
La journée commence inévitablement par un long trajet routier pour rejoindre le circuit. Il est possible de dormir sur place la veille, en tente ou en box réservé préalablement, mais dans tous les cas il est grandement conseillé de partir en camion ou en voiture, moto chargée sur remorque. Premièrement parce qu’une journée sur circuit est éreintante, et le retour au guidon et difficilement concevable, et deuxièmement parce que vous risquez de chuter, donc de vous blesser et de casser votre moto.
Il faut prévoir un bidon d’essence et le plein de votre moto. Tous les participants présents au roulage sont répartis par niveau. Usuellement on dissociera les « pilotes » des « confirmés » aux « débutants ». On renseigne son niveau et son appartenance à l’une de ces catégories le jour de l’inscription. Chaque groupe formé évoluera séparément, par sessions de 20 minutes, il y en a généralement sept par journée. Avant de prendre la piste, le passage au sonomètre est obligatoire. N’oubliez pas d’emmener vos amis, le circuit est un moment qui se partage et qui se vit à plusieurs.
Conseils de pilotage : « l’avis d’un top-pilote »
Tout d’abord ne vous mettez pas la pression. Gardez en tête que vous n’y allez pas pour faire une performance, allez-y pour prendre du plaisir. Ensuite si vous voulez progresser acceptez tous les conseils que l’on peut vous donner. N’hésitez pas à prendre la roue d’un pilote expérimenté pour apprendre les trajectoires, et proposez lui de passer derrière vous pour qu’il vous corrige. Oubliez tout ce que vous avez appris sur route, tous vos repères, c’est dur à accepter mais être un suicidaire des cols, ne fera pas de vous un cador des circuits. Concernant l’approche du pilotage, l’idée globale c’est que c’est cyclique. Phase 1 : le freinage Phase2 : la mise sur l’angle Phase 3 : la ré-accélération. Le tout en étant le plus coulé possible
Concernant les trajectoires, quels conseils donnerais-tu ?
Le principe simple c’est de rentrer à l’extérieure du virage, de chopper le point de corde et de ressortir à l’extérieur de l’autre côté. Suivant l’organisateur la piste est balisée de cônes. Des cônes de différentes couleurs qui servent de repère. Ils vous indiqueront les points d’entrée, les points de cordes, et les points de sorties, le but est d’être le plus prêt d’eux possible. Arrondissez bien vos trajectoires, sur piste il n’y aucune voiture qui arrivera en face, alors utilisez toute la piste. Et des fois il est bon de sacrifier un virage en faveur du suivant.
D’une manière plus détaillée quels conseils donnerais-tu pour le freinage?
Pour les débuts il est important de bien freiner avant le virage, ni trop tôt, ni trop tard, mais surtout pas sur l’angle. Cherchez à prendre les virages à l’élan, et ça ne se fera que si votre freinage est fait correctement, bonne dose et bon moment. Utilisez vos genoux aux freinages pour vous retenir contre le réservoir. Pour le rétrogradage, pour éviter de bloquer la roue arrière, il faut donner un coup de gaz dès que vous débrayez, et lâcher le levier progressivement.
Concernant la mise sur l’angle ?
La prise d’angle c’est le phénomène qui vous fait tourner, c’est le point central. Sur cette phase il faut être neutre, c’est à dire ni frein ni gaz. Sachez que peu importe l’angle qu’on prend, tant qu’on ne freine et n’accélère pas, ça tient. C’est physique, la force centrifuge ne vous laissera pas tomber. Par contre prendre de l’angle ne vous fera pas aller vite, c’est aller vite qui vous fera mettre de l’angle.
Dernière phase, l’accélération ?
Surtout pas « plein angle », ça déclenchera immédiatement une perte d’adhérence du train arrière. Accélérez dès que vous amorcez la sortie de virage, déjà un peu redressé. C’est l’accélération qui finira de relever votre moto. Soyez souple et progressif à la remise des gaz.
Tout ça ce n’est rien si il n’y pas de position adaptée ?
N’hésitez pas à exagérer vos positions. Cherchez à imiter vos idoles. Sortez-vous au maximum de la moto. Sortez au moins une fesse de la selle. L’objectif n’est pas de poser le genou, mais surtout de déplacer les masses. A vitesse égale, plus vous serez « sorti » de votre moto et déhancherez, moins vous aurez besoin de prendre de l’angle. Donc si vous comprenez bien, moins vous prendrez de risque de chuter. Cherchez également à être mobile sur la moto, en appuie au maximum sur les jambes. Usez du réservoir comme point de maintien sur les déhanchements. Pour ça restez bien éloigné de ce dernier. Et comme au permis, les pieds sur la pointe au bout des cale-pieds !
« Peu importe l’angle qu’on prend, tant qu’on ne freine pas et n’accélère pas, ça tient. »
Concernant le regard, quels conseils apporterais-tu ?
A l’approche d’un virage il faut penser à la manière dont on va en sortir avant même de penser à la manière dont on va y rentrer. Cela parait surprenant mais ça conditionnera la manière d’on vous prendrez le virage. Ça vous permettra d’appréhender correctement la courbe et donc d’être plus rapide ! Sinon, comme au permis. Regardez bien au loin, la moto ira où vous regarderez.
Dernier point qui mérite d’être abordé, qu’as tu à nous dire sur l’adhérence ?
L’adhérence, c’est la confiance. Evidemment les premiers tours n’y allez pas comme un forcené d’entrée de jeux. Prenez deux tours pour chauffer vos pneus. Pour l’arrière faite de grosses accélérations bien franches, moto droite évidemment, et pour chauffer l’avant de gros freinages incisifs et progressifs. Inutile de faire des zig-zag. Pour discerner le grip il faut être à l’écoute de sa machine. Chose bête mais logique, plus vous aurez de grip plus vous irez vite. Mais plus vous irez vite, moins il y aura de grip…
Un dernier mot ?
Tu soudes, tu soudes et tu soudes !
Un premier contact avec la piste, c’est comme un premier flirt, tous les sens sont sollicités. A commencer par l’ouïe, étourdie par la résonance des bruits de moteur. Les bicylindres grondent, les quatre cylindres hurlent et leur donnent la réplique. La caresse sonore de cette douce chamaillerie vous hérisse le poil. L’odorat s’imprègne de senteurs incandescentes, les fragrances de gomme brûlée et d’essence devenant de délicieux aphrodisiaques. Le spectacle est à la hauteur de la stimulation. Vous en prendrez plein la vue. Le balai de machines qui se jettent dans les courbes en défiant les lois de la gravité est vraiment impressionnant. Surtout lorsque juste après, c’est à vous de prendre place sur la piste… Votre fantasme d’adolescent va devenir réalité. Ça y est, vous y êtes, sur le point de quitter la Pit-Lane et de vous élancer… GAZ !
Rémi